Au Népal, une arnaque qui atteint des sommets

THEMENBILD - Hubschrauber am Flugfeld Syangboche, das sich oberhalb von Namche Bazaar befindet. Wanderung im Sagarmatha National Park in Nepal, in dem sich auch sein Namensgeber, der Mount Everest, befinden. In Nepali heißt der Everest Sagarmatha, was übersetzt "Stirn des Himmels" bedeutet. Die Wanderung führte von Lukla über Namche Bazar und Gokyo bis ins Everest Base Camp und zum Gipfel des 6189m hohen Island Peak. Aufgenommen am 10.05.2018 in Nepal // Trekkingtour in the Sagarmatha National Park. Nepal on 2018/05/10. EXPA Pictures © 2018, PhotoCredit: EXPA/ Michael Gruber

THEMENBILD – Hubschrauber am Flugfeld Syangboche, das sich oberhalb von Namche Bazaar befindet. Wanderung im Sagarmatha National Park in Nepal, in dem sich auch sein Namensgeber, der Mount Everest, befinden. In Nepali heißt der Everest Sagarmatha, was übersetzt “Stirn des Himmels” bedeutet. Die Wanderung führte von Lukla über Namche Bazar und Gokyo bis ins Everest Base Camp und zum Gipfel des 6189m hohen Island Peak. Aufgenommen am 10.05.2018 in Nepal // Trekkingtour in the Sagarmatha National Park. Nepal on 2018/05/10. EXPA Pictures © 2018, PhotoCredit: EXPA/ Michael Gruber

Le système de fraude aux assurances révélé par l’AFP en juin consistait à persuader les alpinistes de se faire évacuer par hélicoptère. Les porteurs percevaient une commission allant jusqu’à 500 dollars par rapatriement.

Par JULIEN BOUISSOU New Delhi, correspondance

Les autorités népalaises ont identifié une quinzaine d’entreprises ayant participé à cette escroquerie et ont proposé que les opérations de secours soient coordonnées par la police népalaise. MICHAEL GRUBER/EXPA/PRESSE SPORT / PRESSE SPORTS

Un nouveau record vient d’être battu dans l’Everest, celui de l’escroquerie à très haute altitude. Début septembre, le gouvernement népalais a dévoilé une série de mesures pour combattre un système très élaboré de fraude aux assurances, où des randonneurs étaient incités, malgré eux, à recourir à des évacuations par hélicoptère coûteuses, avant d’être hospitalisés. Ces faux sauvetages auraient rapporté plusieurs millions de dollars aux fraudeurs et brisé de nombreux rêves d’ascension.

Le coût du sauvetage estimé de 4 000 à 12 000 dollars

Au printemps, des centaines d’alpinistes convergent chaque année vers l’Everest dans l’espoir d’atteindre son sommet, à 8 848 mètres. Depuis quelque temps, au moindre mal de tête, souffle court ou nausée – symptômes courants du mal d’altitude –, des sherpas peu scrupuleux insistaient pour que leurs clients regagnent Katmandou, la capitale népalaise, par hélicoptère. Les autorités soupçonnent même certains d’entre eux d’avoir empoisonné les touristes en mélangeant du bicarbonate de soude, un laxatif puissant, à leurs repas. Les porteurs percevaient au passage une généreuse commission : jusqu’à 500 dollars par rapatriement, alors qu’un sherpa gagne en moyenne 25 dollars par jour de travail. L’escroquerie ne s’arrêtait pas là. Les alpinistes secourus étaient ensuite gardés quelques jours dans un hôpital de Katmandou, où le mal d’altitude, s’il était réel, disparaissait naturellement, contrairement à la facture des soins, qui, elle, pouvait vite grimper.

L’AFP, qui a révélé l’escroquerie en juin 2018, a recueilli plusieurs témoignages d’alpinistes dupés. L’Australienne Jessica Reeves a ainsi été évacuée par hélicoptère en octobre 2017 parce qu’elle souffrait… d’un rhume. « Il [mon guide] me disait sans cesse de prendre l’hélicoptère, a-t-elle expliqué. Il m’assurait que ce serait trop risqué de continuer et qu’il valait mieux que je parte maintenant. » Avec elle, huit ou neuf autres alpinistes ont été évacués à bord de trois hélicoptères, avec comme consigne de déclarer à leurs assurances qu’ils avaient voyagé seul. La compagnie d’hélicoptères pouvait de cette manière surfacturer les trajets effectués. Alors que le coût du sauvetage est estimé à 4 000 dollars, certains d’entre eux atteignaient 10 000 à 12 000 dollars.

« LA SITUATION EST HORS DE CONTRÔLE. JE NE CROIS PAS QUE VOUS VOUS RENDIEZ COMPTE DE L’AMPLEUR DE LA FRAUDE NI DE LA FAÇON DONT ELLE FONCTIONNE. » DANNY KAINE, TRAVELLER ASSIST

La vallée du Khumbu, qui mène vers le « toit du monde », est ainsi devenue au fil des ans une véritable ruche à hélicoptères, avec de quinze à vingt trajets héliportés par jour. Airbus a dû se frotter les mains en livrant pas moins de vingt appareils au Népal ces cinq dernières années. La fraude était si bien organisée que des escrocs détenaient des participations dans des agences de randonnées, des compagnies d’hélicoptères et des hôpitaux.

En août, plusieurs compagnies d’assurances ont menacé de ne plus couvrir les expéditions. « La situation est hors de contrôle, a écrit Danny Kaine, l’un des responsables de la société britannique Traveller Assist, au ministère népalais du tourisme. Je ne crois pas que vous vous rendiez compte de l’ampleur de la fraude ni de la façon dont elle fonctionne. » Traveller Assist a calculé que 30 % des évacuations héliportées qu’elle a remboursées n’étaient pas nécessaires. Les autorités népalaises ont identifié une quinzaine d’entreprises ayant participé à cette escroquerie et ont proposé que les opérations de secours soient coordonnées par une unité de la police népalaise.

Katmandou, une renaissance

 

L’Everest est devenu une industrie attirant des milliers d’alpinistes chaque année. En 2017, 377 permis ont été délivrés pour le sommet, rapportant à l’Etat népalais 2,92 millions de dollars. Cette manne financière attire des opérateurs à meilleur marché qui offrent une ascension pour 20 000 dollars, soit moins d’un tiers de ce que facturent les agences les plus réputées. Dans l’un des pays les plus pauvres de la planète, où les recettes du tourisme sont vitales, de nombreuses agences proposent également des randonnées dans des vallées de l’Everest plus accessibles, y compris pour les handicapés ou les seniors. Certaines agences baissaient leurs tarifs, quitte à écourter la durée des randonnées, en misant sur les commissions des fausses évacuations.

Par JULIEN BOUISSOU New Delhi, correspondance

Publié Le 05.10.2018 à 17h44

 

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